Une minute. Deux, peut-être. Une à deux minutes d'un silence religieux enveloppent une salle où près de 800 personnes retiennent leur souffle. Sur scène, une jolie blonde en robe rouge et quatre musiciens en noir restent parfaitement immobiles, le corps droit la tête baissée. Au milieu de cette foule communiante, presque gênée de respirer, après ces secondes infinies, quelqu'un applaudit timidement. Puis deux, puis trois. Et tout d'un coup c'est l'explosion. La chanteuse sourit, les musiciens saluent, le public tempête. De longues minutes d'applaudissements passionnés suivent ces quelques secondes d'une rare intensité, concluant l'un des trois rappels de ce concert hors du commun.
Sophie Hunger est suisse. Elle chante indifféremment en français, anglais ou allemand. Elle joue du piano, de la guitare - acoustique ou électrique - de l'harmonica... Un guitariste, un bassiste, un batteur et un joueur de trombone l'accompagnent. C'est tantôt pop, tantôt rock, parfois un peu jazzy, jamais facile, toujours très personnel, souvent très pur, et de temps en temps, divin.
"La chanson suivante s'appelle Walzer Für Niemand", annonce-t-elle penchée sur son piano. "Ça veut dire Valse pour personne. Pour moi et personne. Parce que j'en ai besoin. Toujours. Pour moi et personne". Elle insiste. Personne. Je ne sais pas si c'est la solitude de l'artiste ou l'indépendance de la femme qu'elle sublime ainsi. Peu importe, c'est un de ces jours où l'on a envie de ne valser pour personne. Ou peut-être un de ces jours où personne n'a envie de valser avec vous, mais dans le fond, qu'est-ce que ça change ? On danse mieux tout seul, croit-on savoir. On l'espère et on le craint. Niemand, was willst du von mir ?
Je ne vais pas détailler le concert dans son intégralité, c'est de toute façon un exercice un peu vain. Je note juste une reprise absolument sublime du Vent Nous Portera de Noir Désir, chantée avec beaucoup d'émotion et un léger accent suisse-allemand qui ne manque pas de charme, c'est le moins qu'on puisse dire. J'ai eu l'impression de la redécouvrir. Sachant que j'écoute cette chanson en boucle depuis sa sortie il y a bientôt 10 ans, ça n'est pas un mince compliment.
Le silence après Mozart, c'est encore du Mozart. La musique qui précède le silence très humble de Sophie Hunger respire le talent. Ceux qui avaient choisis d'être là ne s'y sont pas trompés.
Achète moi le disque
RépondreSupprimerPatrick