jeudi 21 janvier 2010

Journaliste perdu cherche berger

[Voilà, c'est rare que je sois content de ce que j'écris pour le blog de L'Atelier, alors j'en profite.]
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J’étais tout à l’heure à l’Epita où s’est tenu une table ronde sur le thème « RIA/Web2.0, les clés pour une e-campagne efficace ».

Cela a surtout été l’occasion pour les participants de discuter du rôle d’Internet dans la politique – locale ou nationale – et en ce qui concerne l’information et l’engagement des citoyens.

Comme beaucoup de journalistes, je m’interroge sur l’avenir des médias traditionnels face à Internet, à la place des métiers de l’information confrontés à de nouveaux modes de communication, etc. C’est donc avec intérêt que j’ai écouté les propos de Benoît Thieulin, qui s’était fait connaître pour avoir mis en place le site Désir D’avenir qui a porté la campagne de Ségolène Royal.

« La télévision et les anciens médias sont très importants et garderont un rôle majeur pour créer les sujets du débat public », expliquait-il. « Mais c’est sur Internet que les citoyens viennent se faire une idée et poursuivre le débat ».

Thierry Solère, maire adjoint de Boulogne-Billancourt et qui fut responsable du site de campagne de Nicolas Sarkozy ne dit pas autre chose.

« Des lieux de débat se sont créés sur Internet qui n’existent plus ailleurs », affirmait-il avant d’enfoncer le clou. « La télévision préfère les séances courtes, calibrées pour la publicité ».

Autrement dit, les « vieux » médias ont simplement un rôle de stimulus, les sujets vont y être effleurés avant d’être débattus sur Internet. Les politiques ont donc tout de même encore besoin de la télévision pour imposer leur calendrier médiatique, qu’il s’agisse de la burqa ou des retraites.

Mais même ce rôle de « créateur de débat » lui est contesté par Internet. A l’heure où tous les citoyens sont équipés d’un appareil photo ou d’une caméra, le buzz peut venir de n’importe où et de n’importe qui… et s’imposer sur la scène médiatique, y compris dans les médias traditionnels.

Jérome Delveau, de Human to Human, que j’ai interviewé il y a quelques mois pour L’Atelier ne me disait pas autre chose : « Quand 10 millions de personnes sont exposés à une information, les médias traditionnels ne peuvent pas l’ignorer sous peine d’être pointés du doigt. Il y a une véritable pression qui s’exerce ».

A entendre les participants, tout cela serait une question de génération. La génération de la télévision a remplacé celle de l’écrit, et celle de l’Internet vient lui succéder.

Une génération plus centrée sur elle-même.

« Nous avons à faire à une génération qui ne s’intéresse plus qu’à elle-même et qui regarde uniquement ce qui la concerne », analysait ainsi Thierry Solère. « Internet participe à cela et amplifie ce phénomène ».

Une idée partagée par Guillaume Mikowski, directeur associé de Brainsonic, pour qui toutes les vidéos d’une durée supérieure à 3 minutes devront nécessairement être chapitrées et séquencées. L’objectif étant de pouvoir accéder directement aux quelques secondes qui intéressent l’internaute. Internet permet de reproduire pour la vidéo les techniques de lecture en diagonale qu'applique plus ou moins consciemment toute une génération.

Pour Benoît Thieulin, il y a deux victimes à ce changement générationnel : les médias et les politiques. Deux secteurs, paradoxalement, qui se sont avérés plutôt dynamiques et innovants ces dernières années.

« Contrairement à ce que l’on entend souvent, les politiques sont plutôt à l’avant garde de ces nouveaux usages du web », explique-t-il.

Reste que certains ont encore du mal à faire la transition.

« Certains vont préférer répondre une feuille de chou qui va toucher 200 personnes et refuseront d’utiliser Twitter, alors que c'est un moyen qui permet de toucher plusieurs milliers de personnes ».

La conclusion que j’ai tirée de cette table ronde, c’est que les politiques ont pris de l’avance sur les journalistes dans la recherche d’une nouvelle recette Internet-compatible. Il faut dire que, sur ce plan précis, ils ont l’avantage d’avoir trouvé en Barak Obama un modèle à suivre. Les médias traditionnels et les journalistes se cherchent encore un champion qui leur indiquerait la voie.

Ps : pour ma recherche d'image j'ai tapé "journaliste et mouton" sur Google images. Sur 18 photos affichées en première page, 15 représentent Harry Roselmack. L'effet TF1 ?

(###) Pourras-tu le faire ? Pourras-tu le dire ?

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